La décadanse

POTO ET CABENGO de Jean-Pierre Gorin

Spoutnik

À QUELLE HEURE PASSE LE TRAIN?
RENCONTRES CINÉMA(S) ET PSYCHIATRIE(S)
CHAPITRE 4: POTO ET CABENGO

POTO ET CABENGO, Jean-Pierre Gorin, États-Unis, Allemagne de l’Ouest (RFA), 1980, 76’, vo sous-titré français

Et, paaaf, autre fenêtre sur la psychiatrie. Avec un film qui s’est lui aussi retrouvé au fond du puits pendant quarante ans, sans que là non plus on ne comprenne pourquoi et comment cela est arrivé. Ce film, c’est POTO ET CABENGO (1978) de Jean-Pierre Gorin. Et Jean-Pierre Gorin, ça a été le camarade de Jean-Luc Godard pour les films qu’ils ont tourné ensemble sous la bannière Dziga Vertov. Leur histoire a mal fini et Gorin s’en est allé aux États-Unis, enseigner et filmer en solitaire, sans rien abandonner du caractère politique, incisif et burlesque à l’œuvre dans son travail avec Godard. POTO ET CABENGO, c’est le nom que se donnent deux sœurs jumelles, Grace et Virginia Kennedy. Grace et Virginia communiquent entre elles avec des mots que leurs parents ne comprennent pas. Les linguistes s’en mêlent. Les psychiatres s’en mêlent. Les logopédistes s’en mêlent. La presse s’en mêle. La télévision s’en mêle. Chacun y va de son explication et tout ce beau monde, soit, célèbre l’invention d’une nouvelle langue, soit, se préoccupe de la reconduction vers la norme de ces deux gamines. Gorin, lui, confronte, monte, démonte tous ces discours. À côté de cela, il mène l’enquête auprès de la famille. La mère, exilée d’Allemagne. Le père, gérant immobilier. Tous deux rêvant de faire fortune en Californie. Mais surtout, il filme les deux sœurs débordant du cadre, les emmène à la bibliothèque ou au zoo. En contraste de ce qu’il vit et traverse avec elles, les adultes autour se ridiculisent et c’est tout le mythe américain qui se décompose sous nos yeux. Une fois l’Amérique à terre, on peut peut-être reconstruire quelque chose autour des jeux de mots de Grace et Virginia.
Tom et Nathan
Signaler une erreur Ajouté par Cinéma Spoutnik le 26 avril 2023