Depuis les années 1950 aux États-Unis, les hommes gays, et plus tard les membres de la communauté LGBTQIA+ en général, se présentaient comme des « amis de Dorothy » afin de communiquer discrètement leur orientation sexuelle. L’origine de l’expression est incertaine ; peut-être s’agit-il d’une référence au personnage de Dorothy, dans Le Magicien d’Oz, incarné par l’icône gay qu’est Judy Garland. Quoi qu’il en soit, en 1981, ayant eu vent de ce phénomène au sein de l’armée américaine à Chicago et convaincu que cette fameuse Dorothy était une vraie personne, le NIS, la section d’enquête de la marine, a lancé une importante chasse pour l’attraper, espérant qu’elle révélerait les noms de tous ses amis militaires homosexuels.
L’installation immersive de Vincent Grange invite le public à visiter les différentes pièces et couloirs de la maison de Dorothy, cette femme imaginaire recherchée par l’armée. En plus de condamner une enquête homophobe à travers une philosophie de l’absurde, ce projet rend hommage aux nombreux espaces queers à travers le monde et à leurs histoires, et entend rappeler l’importance primordiale de leur existence dans un monde où 67 pays condamnent toujours l’homosexualité et la transidentité. À l’intersection de l’histoire queer et du design spatial, l’architecture, les artefacts et les différentes machines de l’installation contribuent à raconter la vie extraordinaire de cette femme imaginaire.
À propos de l’artiste Vincent Grange
Récemment diplômé du master Espace et Communication de la HEAD – Genève (Haute école d’art et de design), et convaincu que le public est plus enclin à réfléchir avec l’artiste une fois immergé dans une œuvre d’art, Vincent s’est spécialisé dans les installations immersives à grande échelle. Inspiré par le mouvement ‘Pataphysique, il remet en question les codes de notre société hétéronormative en inventant des réalités alternatives. L’architecture, les artefacts et les différentes machines qu’il crée invitent le public à interpréter chaque décision de design, et à déchiffrer l’histoire – souvent absurde et poétique – racontée ici. Cofondateur de l’espace Dukat à Carouge, il y a établi son atelier et y expose son travail régulièrement. Vincent a aussi eu la chance de présenter ses projets au Bombas Gens à Valence en Espagne et lors de la Geneva Pride 2023. En 2024, il participera également à la Biennale du design de Ljubljana. Il est finaliste pour le Prix Kiefer Hablitzel Göhner aux Swiss Art Awards à ArtBasel 2024 et Lauréat des Bourses Déliée 2024 du Fonds Cantonal d’Art Contemporain (FCAC).