texte_Magne van den Berg
traduction_Esther Gouarné
mise en scène_Sarah Calcine
jeu_Barbara Baker, Jeanne De Mont
Un matin d’automne, l’odeur fraiche de la mousse du sous-bois se mêle à la fumée froide qui imprègne les vêtements humides des habitantes du terrain. La mousse s’est installée partout, même sur le sucre. Dom, devant la caravane au plastique jauni, sur sa chaise en plastique jauni, boit son café jauni en attendant que Gaby émerge. Presque silence. Gaby n’est pas bavarde, mais Dom lui parle quand même. Elles attendent de la visite. Elles se changent et se rechangent, hésitent entre jupe et pantalon, débattent entre pantalon et jupe. Une coquetterie dissonante au regard de l’état des lainages tâchés, des feutres déchirés et mal assortis qu’elles possèdent dans leur petite garde-robe. Elles attendent: elles ont le temps de douter et de négocier. Au hasard des essayages, Dom met la main sur le vieux manteau. Elle veut que Gaby l’enfile à nouveau. Une dernière fois. Pour chasser le souvenir. Gaby n’en a pas très envie, Dom insiste. Dom bouscule, veille, évite que, discrètement, en silence, la mousse n’envahisse Gaby à son tour.
Il faut de la dextérité et de la sensibilité pour ciseler des dialogues où aucun mot n’est de trop, où la cruauté se cache dans les vides et la tendresse recouvre tout. Magne Van Den Berg nous fait attendre avec délectation personne et rien, alors que Sarah Calcine fait résonner les cordes à linge et les claquettes aux pieds de toutes les nuances d’une amitié de femmes.